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Définition : sportive
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Définition : sportive
Je ne dirai qu'un mot: Vroooom !
par Philippe Guillaume | 05.09.2018 à 07:00
Définition : sportive
Comment la notion de performance est mise en avant par les constructeurs
Revue des troupes avant l'apparition heureuse de la GSX-R !
Voilà une question compliquée : la première sportive de l'histoire de la moto, c'est quoi ? Car avant que l'humanité ne régresse, que la vitesse ne finisse par entrer dans le camp du Mal et que Emmanuel Barbe ne nous explique (sic) que de rouler sur des routes dangereuses, c'est vraiment super pour notre sécurité, la notion de progrès était indissociable de celle de performance et de dépassement de soi.
Tenez, en prenant cette théorie, on peut donc imaginer que le premier marathon de l'histoire de l'humanité ne s'est pas couru sur un champ de bataille en Grèce en 490 avant JC, mais plutôt quelques centaines de milliers d'années avant, quand un néandertalien qui avait plus la dalle qu'un autre néandertalien a voulu faire les freins à son confrère pour être le premier à aller tailler un costard à un mammouth qui passait par là et d'avoir l'exclu sur un t-bone format XXXXL.
Dès que le premier véhicule a été produit en deux exemplaires, on a donc forcément trouvé un gus qui voulait aller plus vite que l'autre. C'est comme ça, c'est humain : enfin le genre d'humanité qui a existé avant les RT : pas les grosses BMW (car on peut aussi se tirer la bourre avec elles !) mais le RT, pour Radar-Tronçon. Avec le RT, c'est sûr, tout le monde se traîne à la même vitesse ; c'est beau, l'égalité. Vive le progrès !
Une moto, ça d'abord sert à aller vite !
Que Barbe, Perrichon, Got et Philippe ne nous fassent pas une crise cardiaque en lisant cet intertitre (en même temps, ça nous ferait des vacances), mais c'est un fait. La vitesse est un état d'esprit et l'esprit de compétition a marqué l'histoire de la mobilité. Si l'on fait remonter la première moto à 1894, alors il est intéressant de noter que la première course de moto eut lieu en 1895 et que le Tourist Trophy de l'Île de Man se tient depuis 1907, quasiment sans discontinuer.
Le seul truc, c'est qu'il n'existe alors pas vraiment de "moto de sport" : il existe des "motos avec lesquelles on fait du sport", nuance. Du coup, on pourrait ergoter pendant des millénaires : est-ce que la Norton à moteur Peugeot, qui a gagné le premier TT de l'histoire, c'est-elle la première moto sportive ? Oui : elle a gagné une course. Non : votre arrière grand-mère a probablement acheté la même et c'était en réalité une moto de série, peu modifiée.
Tout repose donc sur une double question, à la fois de référentiel et aussi de lien de proximité par rapport à la machine qui gagne et de sa différenciation avec celle achetée par le tout-venant des motards. Aux États-Unis, par exemple, est-ce que la première sportive fut la Harley-Davidson de Joe Petrali (premier champion de flat track de l'AMA en 1933), ou bien plutôt une XLCR 1000 de 1977, première moto américaine avec trois freins à disques ?
On pourrait alors rétorquer que la Grande-Bretagne, dans les années 50 et 60, a produit quelques monocylindres particulièrement affûtés, chez Velocette, BSA ou même Norton.
Et même avant ça : au tournant des années 30, la Brough Superior dépasse les 100 mph (160 km/h et c'est juste stratosphérique vu le niveau moyen de performances des autos de l'époque et surtout l'état des routes). Rouler à fond avec une Brough Superior, ça devait être très "sport" ! Tout comme frôler les 200 km/h dans les années 40, avec une Vincent Black Shadow !
Ou est-ce alors la Honda CB 750 ? Elle n'avait rien de fondamentalement plus "sportif" que ses concurrentes anglaises, mais avec elle, on pouvait rouler longtemps sans prendre le moteur dans la tronche, même en restant aux alentours de sa vitesse de pointe, un peu plus de 180 km/h ! Car à la fin des années 50, les Sportster et Bonneville n'étaient pas les motos de poseurs d'aujourd'hui : elles étaient aussi achetées par des motards amateurs de performances... et qui aiment bricoler plus que de raison.
Gagner le dimanche, vendre le lundi. Ou pas...
Il impose donc ici de marquer une rupture sémantique et conceptuelle : une moto de sport, ce n'est plus une moto de route. C'est un truc développé exprès avec pour unique but la performance ultime. Et c'est là que la véritable sportive apparaît, pour boucler la boucle : de cette moto de course, on va faire homologuer et dériver un engin qui pourra rouler sur route. En quatre-temps, c'est simple : c'est la Suzuki GSX-R 750 de 1985 qui écrit une nouvelle ère, car dans les années 50, 60 et 70, il n'existe pas de dérivé des motos de GP que l'on puisse s'acheter.
Est-ce suffisant pour la considérer comme la primogénitrice ? Difficile d'être aussi affirmatif : après tout, une Yamaha 350 RDLC puisait sa filiation dans les TZ de course, bien avant les fabuleuses Suzuki RG 500 Gamma, Honda NSR 400 et Yamaha 500 RDLC. Et si on remonte avant, comment trancher : en Italie, par exemple, est-ce que les Guzzi V7 et Ducati 750 Sport ont été développées pour la course, ou est ce qu'on les a suffisamment bien développées pour faire de la course avec ? Va savoir Charles, l'œuf, la poule, tout ça. Par contre, au tournant des années 90, les petites 250 2-temps sont alors ce qui se fait de plus proche d'une vraie moto de course. Si vous en trouvez une belle, n'hésitez pas : on ne fera jamais rien d'aussi pur à piloter.
Parce qu'il faut bien trancher...
Allez, on va lancer trois étapes. Même quatre : niveau zéro, ce sont les monocylindres anglais des années 50, pour le haut rendement mécanique de leur bloc (certes, qui était infernal à démarrer et qui demandait des vidanges tous les 1000 km), à leurs freins à tambour sophistiqués et la précision de leur châssis (comparez une Velocette Venom à une Royal Enfield Bullet des mêmes années et vous comprendrez la différence).
Ensuite, l'an 1 : la CB 750 de 1969 ; rien d'époustouflant dans l'absolu (un petit moteur type bagnole collé dans une moto, Friedl Munch avait fait ça avant avec sa Mammut), mais une combinaison absolument inédite pour l'époque entre un prix raisonnable, une puissance facile et domesticable et surtout, une capacité à ne pas faire exploser le moteur dès que l'on tirait dedans...
Ensuite, ça stagne pendant 15 ans. Certes, on gagne en cylindrée, en puissance, en performances. Kawa Z 900, Z 1000 R, Honda CB 1100 R, ça en jette. Mais elles doivent tout à la CB 750. Même la 900 Ninja, qui introduit le refroidissement liquide est qui est la première sportive à dépasser les 240 chrono. Elle ne révolutionne rien : architecture classique, poids élevé.
D'ailleurs, pour palier aux déficiences et au manque d'innovation des constructeurs, les artisans (Dunstall pour Norton, Godier-Genoud pour Kawa, Egli, Bimota et Martin avec à peu près tout le monde) vont réussir à optimiser des motos de série, non sans légitimité d'ailleurs, puisque Egli, Bimota et Godier-Genoud obtiendront de sérieux résultats en compétition... Mais hélas, leur fin approche et elle est signée Suzuki.
Non, l'an 2, c'est évidemment la GSX-R 750 de 1985 : cadre alu et poids réduit (176 kilos), une vraie fille de la course : ce n'est pas du pipeau, puisque basée sur la GS 1000 d'Endurance, la GSX-R 750 permet à Kevin Schwantz de gagner les 200 miles de Daytona en 1985.
Ensuite, encore, il ne se passe rien pendant 15 ans. Rien de révolutionnaire, cependant. La CBR 900 apporte légèreté et facilité, la première R1 une bonne dose de puissance, les GSX-R 1100 n'en finissent plus de devenir des grosses dindes empâtées dans leur coloris violet et fluo et la GSX-R 1000 de 2000 réveille un peu tout le monde avec une grosse louche de patate supplémentaire.
Et voici l'an 3 : 2009 et à la surprise générale, elle vient d'une marque qui faisait jusqu'à présent des motos de flics. 200 chevaux, une distribution par linguets et surtout, une électronique complète qui rend le tout à peu près contrôlable, bienvenue à la S1000RR. Suzuki et Honda prennent une baffe gigantesque et mettent huit ans à s'en remettre et sortir de la cave, Kawasaki réagit le premier en dotant sa ZX-10R d'un contrôle de traction et d'un ABS race et la R1 se remet au goût du jour dans la foulée, tandis qu'Aprilia ne rate pas le coche avec sa RSV4, qui tient toujours le haut du pavé. Ducati se remet conceptuellement en cause et abandonne le V2 pour sortir l'époustouflante Panigale V4.
Voilà où nous en sommes. Et qu'est-ce qui se profile ? L'ère du compresseur, les amis et c'est Kawasaki qui défriche le terrain avec ses H2. Car même dans l'ère du RT, on ne peut pas arrêter le progrès. Heureusement, d'ailleurs.
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