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Lada 2101-7, la deuxième voiture la plus produite de l’histoire
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Lada 2101-7, la deuxième voiture la plus produite de l’histoire
Stéphane Schlesinger Le 13 Août 2021
Route de nuit - Lada 2101-7, la deuxième voiture la plus produite de l’histoire
S’il est bien connu que la VW Coccinelle détient le record de production mondial, on sait beaucoup moins que la Lada dérivant de la Fiat 124 suit de très près.
Une voiture souvent regardée de haut mais dont les Soviétiques comme les Occidentaux ont fait leur choux gras…
Une certaine surprise m’avait saisi quand ma grand-mère m’avait dit : « elle est à moi. » Elle venait de s’offrir, comptant, une Lada 1200S break, orange intérieur marron. « Comme ça, le chien aura de la place. » Effectivement, elle possédait un énorme dogue allemand bleu métallisé, aussi bête que la grille qui le cantonnait dans le coffre, l’empêchant ainsi de manger les sièges.
C’était en 1980, et mon aïeule allait en baver avec cette voiture soviétique, lourde à conduire et jamais avare d’une panne facétieuse, pas grave mais immobilisante.
Il est pratiquement impossible de distinguer du premier coup d’œil la Lada 2101 de la Fiat 124 dont elle dérive.
Une fois que nous faisions la route de nuit dans le break soviétique, les phares ont tout d’un coup déclaré forfait. Nous sommes rentrés à la maison en nous servant de l’éclairage d’une auto que nous avons suivie…
Cette Lada avait « BA3 » écrit sur le volant. Deux lettres et un chiffre, croyais-je. Personne ne savait ce que ça voulait dire dans ma famille. Bien plus tard, un copain russe me révélera le sens de « BA3 » : c’est VAZ en alphabet cyrillique, le vrai nom du constructeur de la 1200. D’ailleurs, en URSS, on l’appelle Jigouli, Lada ne servant qu’à l’export.
Calandre 4 phares et présentation plus cossue pour la Lada 1300S. Elle verse presque dans une impardonnable décadence réactionnaire et occidentale !
Je me souviens de l’odeur particulière de la sellerie en skaï marron, de l’inconfort de la suspension et surtout du bruit du moteur, qui faisait vibrer toute la caisse à haut régime ! Ma grand-mère détestait qu’on critique sa Lada, soulignait qu’en hiver, elle était « très bien chauffée », et me vantait sa fiabilité : « La preuve, c’est écrit derrière ». « Une solide réputation de robustesse », disait l’autocollant publicitaire collé sur la lunette arrière. Elle l’avait cru, puis rendant compte de son erreur, faisait preuve d’une mauvaise foi indestructible, elle… Mon oncle l’a débarrassée de son break russe, qu’il a dû planter sur une route mouillée, quelques années plus tard.
Avec son 1,6 l et son équipement riche, la 2106, ou 1600S, est le haut de gamme de Lada. Il fallait une bonne place au parti pour se l’offrir en URSS…
A l’époque, Lada effectuait une jolie percée sur le marché français, où il allait écouler annuellement plus de 20 000 autos. Celles-ci étaient alors achetées une misère en roubles, reconstruites par l’importateur Jacques Poch dans une usine spéciale à Strasbourg, puis vendues avec une grosse marge. Plusieurs pays européens allaient procéder de même, comme la Belgique ou l’Angleterre.
Moquette épaisse, parements en bois (enfin presque), et instrumentation complète : le tableau de la 1600S ne fait pas du tout low-cost.
L’histoire de cette voiture remonte aux années 60. Dante Giacosa, le brillant directeur technique de Fiat, n’a pas compris tout de suite pourquoi on lui avait interdit de développer une familiale à roues avant motrices, à moins qu’elle ne soit badgée Autobianchi (ce sera la Primula). Pour remplacer la 1100, il a été contraint de concevoir contre ses convictions une classique trois-volumes à propulsion et essieu arrière rigide, simple à fabriquer et robuste : la 124.
Quand le paradis communiste s’inspire du luxe de l’Ouest, cela donne la Lada 2107 à l’opulente calandre chromée.
En réalité, les dirigeants de Fiat lorgnaient depuis longtemps sur l’immense marché que représentait le bloc soviétique, et avaient pensé à un modèle adapté aux deux côtés du mur de Berlin dès le début de la conception de la 124, mais sans le dire à personne. Et pour cause : le contrat de coopération avec l’Union Soviétique n’a été signé qu’en 1966, à la sortie de la 124 ! Celle-ci est élue voiture de l’année 1967, puis, dès 1969, son variant russe roule.
Changement complet de look pour le tableau de la 2107, qui donne au tout-plastique noir.
Par rapport à la Fiat, la Lada jouit d’une suspension renforcée et relevée, de tôles plus épaisses, et d’un moteur modifié, bénéficiant d’un arbre à cames en tête entrainé par chaîne. Ce n’est pas une meilleure auto, elle est surtout adaptée à l’éprouvant réseau routier russe. La fabrication est lancée en 1970, dans l’immense usine livrée clés en main par Fiat, sise à Togliattigrad, du nom de Pamiro Togliatti, cofondateur du parti communiste italien. Elle enferme la plus longue chaîne de production du monde !
En URSS, on raisonne en plans quinquennaux, et celui de la Lada 1200, codée 2101, stipule qu’il faut en fabriquer 750 000 par an. En Europe, elle est vendue moins cher que la Fiat 124 et se vend plutôt bien, montrant qu’il existe un marché pour les autos simples, robustes et abordables, bien avant Dacia.
Largement modernisée, la Lada 2105 permettra à Lada d’augmenter significativement ses ventes dans les pays occidentaux.
La 1200 sera déclinée en berline (2101), en break (2102), en 1500 (2103) dotée d’une calandre à 4 phares dessinée chez Fiat et d’un habitacle plus cossu, cette variante recevant ensuite un 1300 (21035). Arrive ensuite la 1600 (2106) avec des parechocs et une présentation plus étoffés.
Puis la Jigouli bénéficie d’un restylage important (si, si), en 1979. Cela donne la 2105, aux extrémités redessinées, et nantie d’un tout nouvel habitacle, alors que son moteur 1,3 l se voit retravaillé pour moins consommer. Elle peut aussi accueillir un 1,2 l et un 1,5 l. Un break 2104 en sera dérivé et connaîtra un vif succès chez nous.
En 1983, c’est la 2107 qui débarque, surnommée « la Mercedes russe », à cause de sa grosse calandre chromée. Cette évolution de la 2106 recevra bien des groupes, de 1,3 l à 1,7 l (1,6 l en France), et sera produite jusqu’en 2012, se positionnant en tête du marché russe encore en 2007 !
D’ailleurs, après la chute du mur, les Russes sont venus en Europe de l’Ouest racheter à vil prix les Lada qui s’y trouvaient : personne n’en voulait plus et elles étaient bien mieux fabriquées que les leurs !
Joli succès pour le break 2104, pas cher, spacieux et robuste, si on sait bricoler un peu.
Au total, la Lada traditionnelle, toutes versions confondues, sera fabriquée dans divers pays (URSS puis Russie, Ukraine, Egypte) à plus de 17,75 millions d’exemplaires. Raisonnons en termes de plateforme : on peut ajouter à ce chiffre ceux de la Fiat 124 (2,2 millions), de la Seat 124 espagnole (900 000), de la Tofas 124 turque (134 867), sans oublier les modèles fabriqués en Inde, au Maroc, en Allemagne, voire en Corée. On dépasse d’un poil les 21 millions !
Contrairement à ce qu’on croit souvent, la Polski-Fiat 125 n’a rien à voir avec la Lada, si ce n’est l’ambition de bien se vendre sur un marché de l’Est. Elle dérive de la Fiat 125 qui, si elle ressemble à la 124, cache en fait des dessous plus anciens de 1300-1500.
Aussi, on ne comptabilisera pas ses chiffres de vente avec ceux de la 124. La VW reste donc devant, avec 21,5 millions, mais elle a été produite plus longtemps : 65 ans, contre 51 ans à la 124 et ses dérivées. Les deux voitures les plus vendues au monde ont été créées à l’initiative de régimes épouvantables et totalitaires : étonnant, non ?
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